ISBN-13: 9781514101698 / Francuski / Miękka / 2015 / 288 str.
Extrait: I Le jour de la fete de fin d'annee, au college, on avait mis devant une fenetre, dans un grand tas, toutes les brassieres de laine blanche et les petits chaussons tricotes dans l'annee pour les bonnes uvres. Les eleves, en sautant par la fenetre, passaient par-dessus en se bousculant et en criant. Elles avaient renverse toute la pile, et ne se retournaient meme pas. Les petits lainages, dans la boue, ecartaient des bras de dix centimetres. Depuis le matin, les groupes de petites filles, avec les surveillantes qui les depassaient a peine de la tete, levaient le nez, interrogeaient le ciel en disant: -Est-ce que ca va s'arranger? C'etait une fete de plein air, et on avait pose sur le jardin une grande decoration, branche a branche, frange a frange, un travail qui durait depuis quinze jours. Ce qui fait qu'on ne reconnaissait plus, sous les guirlandes et sous les banderoles, les grands tilleuls et les pelouses symetriques. La pluie, survenant a quatre heures, avait mis le desordre sur toutes ces choses. On s'etait refugie en hate dans les batiments, qui etaient des especes de hangars, des logements abandonnes autour du grand jardin. On repoussait pele-mele les costumes de marquis du menuet, les grandes robes du proverbe de madame Gerard d'Houville, les petits corsets, les manteaux, les chapeaux d'uniforme, pour continuer la representation malgre la pluie, faire de la place pour celles qui allaient danser, celles qui allaient chanter, et aussi pour le public. Les surveillantes de l'entree s'etaient mises a courir avec des journaux sur la tete, pour arriver jusqu'aux petits toits en auvent devant les cabinets. Ainsi tournant le dos a la grille d'entree. Ce qui fait que les garcons qui passaient sur la route, des garcons qui etaient absolument sans cousine et sans s ur de lait, voyant les annonces de Kermesse sur de grands calicots pendus, s'etaient arretes et etaient venus a la fin de leur dimanche des uvre. Ils etaient ravis de trouver la tant de jeunes personnes affolees depuis qu'ils etaient apparus, et deja pretes a se rendre. Et nous, nous l'avions toujours secretement reve, a l'internat. Nous savions qu'un jour des garcons arriveraient, sur des motocyclettes en grand chahut, qu'ils nous emporteraient, a califourchon derriere eux ou sur leurs epaules. Au milieu des feuilles de tilleul d'octobre, sur le pave gele de la cour, traineraient seulement les cadavres egorges des surveillantes et de la directrice."