ISBN-13: 9781519405418 / Francuski / Miękka / 2015 / 208 str.
Extrait: I Je suis si petite qu'on pourrait me donner la qualification de naine, si ma tete, mes pieds et mes mains n'etaient pas parfaitement proportionnes a ma taille. Mon visage n'a ni la longueur demesuree, ni la largeur ridicule que l'on attribue aux nains et aux etres difformes en general, et la finesse de mes extremites serait enviee par plus d'une belle dame. Cependant, l'exiguite de ma taille m'a fait verser des larmes en cachette. Je dis en cachette, car mon corps lilliputien renfermait une ame fiere, orgueilleuse, incapable de donner le spectacle de ses faiblesses au premier venu..., et surtout a ma tante. Du moins, telle etait ma facon de sentir a quinze ans. Mais les evenements, les chagrins, les soucis, les joies, la pratique de la vie, en un mot, ont detendu rapidement des caracteres beaucoup plus rigides que le mien. Ma tante etait la femme la plus desagreable que j'aie jamais connue. Je la trouvais fort laide, autant que mon esprit, qui n'avait jamais rien vu ni rien compare, pouvait en juger. Sa figure etait anguleuse et commune, sa voix criarde, sa demarche lourde et sa stature ridiculement elevee. Pres d'elle, j'avais l'air d'un puceron, d'une fourmi. Quand je lui parlais, je levais la tete aussi haut que si j'avais voulu examiner la cime d'un peuplier. Elle etait d'origine plebeienne et, semblable a beaucoup de gens de sa race, prisait par-dessus tout la force physique et professait pour ma chetive personne un dedain qui m'ecrasait. Son moral etait la reproduction fidele de son physique. Il ne renfermait que des apretes, des asperites, des angles aigus contre lesquels les infortunes, qui vivaient avec elle, se cassaient le nez quotidiennement. Mon oncle, gentilhomme campagnard dont la betise etait devenue proverbiale dans le pays, l'avait epousee par faiblesse d'esprit et de caractere. Il mourut peu de temps apres son mariage, et je ne l'ai jamais connu. Quand je pus reflechir, j'attribuai cette mort prematuree a ma tante, qui me paraissait de force a conduire rapidement en terre non seulement un pauvre sire comme mon oncle, mais encore tout un regiment de maris."