ISBN-13: 9781495997419 / Francuski / Miękka / 2014 / 208 str.
ALGRE un usage depuis longtemps etabli, nous avions passe un ete enfermes dans les murs d'une grande ville; mais le moment de la liberte arriva, et les oiseaux n'ont pas plus de plaisir a quitter leur cage que nous en eumes a commander des chevaux de poste. Nous etions quatre dans une legere caleche de voyage, que de vigoureux chevaux normands transportaient gaiement vers leur province natale. Nous quittions Paris pour quelque temps, la reine des cites modernes, avec son tumulte et son ordre, ses palais et ses rues etroites, son elegance et sa salete, ses habitants toujours en mouvement et ses politiques stationnaires, ses theories en contradiction avec sa pratique, sa richesse et sa pauvrete, sa gaiete et sa tristesse, ses rentiers et ses patriotes, ses jeunes liberaux et ses vieux ultras, ses trois etats et son egalite, sa delicatesse de langage et son energie de conduite, son gouvernement du peuple et son peuple ingouvernable, ses baionnettes et sa force morale, sa science et son ignorance, ses plaisirs et ses revolutions, sa resistance qui recule et son mouvement qui s'arrete, ses marchandes de modes, ses philosophes, ses danseurs d'Opera, ses poetes, ses joueurs de violon, ses banquiers et ses cuisiniers. Bien que confines depuis longtemps en-deca des arrieres, il ne nous etait pas facile de quitter Paris tout a fait sans regrets: Paris, que tout etranger critique, et que tout etranger recherche, que les moralistes abhorrent et qu'ils imitent, qui fait secouer la tete des vieillards et battre le c ur des jeunes gens; Paris, le centre d'excellentes choses et de choses qu'on ne peut nommer Cette nuit-la nous reposames notre tete sur de rustiques oreillers, loin de la capitale de la France. Le jour suivant nous respirames la brise de mer. Traversant l'Artois et la Flandre francaise, dans la matinee du quatrieme jour nous entrames dans le nouveau royaume de Belgique par les villes historiques et venerables de Douai, Tournai et Ath. A chaque pas nous rencontrions le drapeau qui flotte sur le pavillon des Tuileries, et nous reconnaissions l'air confiant et la demarche aisee des soldats francais. Ils avaient ete envoyes pour soutenir le trone chancelant de la maison de Saxe, et ils nous semblaient aussi a leur aise que lorsqu'ils se promenaient oisivement sur le quai d'Orsay."