ISBN-13: 9781511799416 / Francuski / Miękka / 2015 / 156 str.
Bonjour, mon nom est... Oh, et puis non. Vous dire comment je m'appelle n'a en fait pas la moindre importance. C'est vrai, cher ami - permettez-moi de vous appeler ainsi, vous qui allez m'accompagnez dans cette aventure - l'histoire que je vais vous conter ici aurait pu arriver a tout le monde. A vous qui en entreprenez la lecture ou a celui qui n'en entendra jamais parler. La seule raison pour laquelle c'est moi qui vous la raconte, c'est que c'est a moi qu'elle est arrivee. Voici donc mon histoire. Tout a commence un jour ou je m'arretai pour regarder le ciel. Ah, j'allais oublier de vous dire, je suis journaliste. Pas de ceux qui font le tour du monde toutes les semaines - bien que cela ne m'aurait pas deplu de parcourir la planete dans tous les sens pour y decouvrir des tas de choses interessantes - mais un journaliste en costume cravate dont les articles serieux paraissent dans un journal serieux pour des gens serieux qui veulent avoir des informations serieuses afin de devenir des personnes encore plus importantes qu'elles ne le sont. Or donc, disais-je, tout a commence un jour ou je m'arretai pour regarder le ciel. Un jour de printemps banal comme je les aime, ni plus beau, ni plus pluvieux qu'un autre. Il n'avait vraiment rien de particulier. Si ce n'est, peut-etre, ce leger souffle delicieusement tiede d'une brise langoureuse qui poussait paresseusement quelques nuages epars marquetant l'azur avec delicatesse. Un de ces jours ou une douceur rejouissante vous embrasse de sa serenite rassurante. Un de ces jours ou rien d'extraordinaire ni d'exceptionnel ne peut vous arriver. C'est, en tout cas, ce que je pensais car j'etais loin d'imaginer ce qui allait survenir. Apres un rendez-vous important avec un industriel, un monsieur tres serieux et tres important que j'etais venu interviewer pour mon enquete eminemment importante comme me le repetait tous les matins mon redacteur en chef tres tres serieux, j'avais decide de ne pas prendre de taxi pour rentrer directement au bureau mais de m'aerer un peu les meninges en marchant aux alentours. Nonchalamment, je me mis a cheminer dans les rues mornes aux couleurs sales de cette ville impersonnelle de banlieue, froide comme un iceberg. Soudain, en traversant une cite plantee de tours en beton qui se disputaient la palme de la tristesse, je fis halte. En ce milieu d'apres-midi, dans cet endroit denue de la moindre once de poesie, je venais d'apercevoir entre deux immeubles le bleu du ciel d'une profondeur infinie. Je me mis a le fixer et a en admirer l'absolue beaute. Des frissons d'eternite me parcoururent de la tete aux pieds. Voila qu'alors un nuage sans gene a la silhouette arrondie d'une chaussette surmontee de deux petites oreilles en areoles decida de passer devant le roi soleil. Le manege de ce petit effronte, je ne sais pourquoi, excita mon imagination. J'aurais voulu etre confortablement installe dans le moelleux de ses courbes, planant dans un halo ouate. J'aurais voulu que mon esprit, enveloppe de cette quietude si grisante, se mette a vagabonder dans ces ethers. Mecanisme singulier de la memoire, cette reverie me transporta vers mon enfance ou, maintes fois, j'etais alle m'asseoir sur un beau nuage floconneux, volant avec les divines fees, les animaux fabuleux et toutes les creatures surnaturelles de l'univers. Et la, subitement, le desir d'y retourner immediatement me demangeait. Mais, apres toutes ces annees d'oubli, je ne parvins pas a en retrouver le mode d'emploi. Bien que je fusse quelque peu chagrine par mon impuissance, je me consolai en me disant que ce n'etait pas evident de monter sur un nuage, comme ca, des qu'on en a envie. Essayez et vous verrez. Seuls les anges, parait-il, possedent cette chance."